Arrivée de Lothilde

Se préparant à retraverser à nouveau la cour en remontant le col de sa chemise et sortant rapidement les manchettes de sa chemise à sa veste, il stoppa le pas et revint en vitesse vers la porte en laissant voir aux gardes qu’il avait la situation en main.

C’est bon compagnons…j’y vais..j’y vais.

Relevant de la main le pan droit de sa longue veste, il glissa la main à sa hanche, touchant à peine son poignard. Tournoyant ensuite la tête en relevant le menton pour s’en dégagé le cou de ce col qui le harassait un peu, il y glissa le doigt pour desserrer en haussant le ton près de l’huis.

Oui ! Qui va là ? Déclinez je vous prie !

En bon huissier, il poussa du doigt le petit panneau de bois et souleva un sourcil, tournant un peu l'oreille en attendant la réponse, s’évitant de poser l’œil à l’ouverture. Remontant d’un tour les manches de sa veste, il n'était pas question de mal s’y présenter devant tout ces gens qui allaient venir.

Les yeux fixés sur le petit guichet à claustra qui venait de s'entrouvrir, Lothilde se mit à rire et approcha d'un pas vers l'oreille qui s'y encadrait, tapotant des doigts au montant de la porte

J"ai reconnu votre voix...et je vous laisse le soin de reconnaître la mienne...lieutenant Zephirin !... vous savez...cette voix qui grimpe dans les aigus quand vous vous ingéniez à mettre la dame en colère ! Vous avez une oreille proportionnée à votre taille...Alors, lieutenant, je demande..droit d'asile dans l'antre de tous les dangers ! allez vous laisser entrer...la guigne dans votre domaine ? Réfléchissez bien...Vous savez tous les désagréments que je suis capable d'occasionner !

Souriant en coin à la réplique, l’artilleur plia un peu les genoux en mettant l’œil dans le trou. Arff...la malchance en personne. La guigne des mauvais jours devenue précieuse.

Redressant le dos en fermant le guichet, il tira fermement sur le verrou coulissant et tira à la lourde porte. Passant la tête à la porte entrouverte, il glissa du haut en bas les yeux sur elle, avant d’étirer le nez à gauche et à droit pour être certain qu’elle était seule. Revenant sur elle, il s’arrêta à son visage.

Sale gueule gouverneure. Vous devez mourir d’envie...de retirer vos chausses hein ? La seule baronne va nu pied...que je connaisse. Bienvenue chez les compagnons St-Maurice.

Esquissant un léger sourire, il ouvrit complètement la porte et s’avança d’un pas vers elle en lui posant la main à l’épaule avant de se diriger vers la monture.

Allez...entrez. Je vais prendre votre cheval et le faire conduire....Spike vous montrera. Dites...vous avez faim ou soif ? Je peux vous faire apporter avant d'y monter.

Tirant doucement sur les cuirs qui allaient glisser hors de l’anneau, il claqua la langue en tirant un peu pour faire passer le cheval à la porte.

Aux échanges de voix, la jeune femme laissa un sourire se glisser à ses lèvres... la voilà qui s'avançait à la porte cette femme qu'elle avait eu comme capitaine et comme gouverneure.
La rousse militaire attendit encore quelques instant avant que d'un coup de rein elle ne s'écarta du mur et s'avança lentement vers la nouvelle arrivante qui passait à présent la porte...

Sans un mot, ses paupières plissées au soleil qui la gênait un peu, elle hocha doucement la tête à la dame, laissant de la place au cheval pour pénétrer sur la cour et que Zephirin allait conduire à l'écurie, . Elle ne put s'empêcher de détourner un court instant son regard de la femme pour regarder rapidement au poitrail du destrier où seuls quelques poils plus courts et de couleur claire visualisaient encore l'endroit de la blessure... Elle fixa à nouveau la femme et s'avança maintenant vers elle.

Dame Lothilde... bien à vous... heureuse de vous voir dans nos murs...
Tout est prêt... mais si vous voulez avoir accès à la salle des discussions...
il faut que vous inscriviez votre nom sur le registre...
Tous peuvent entrer à la guérite et voir les endroits... mais pour pouvoir y pénétrer plus loin et en particulier pour l'endroit prévu pour accueillir les personnes qui vont réfléchir.... vous devez laisser votre nom au registre...

Lothilde sourit franchement à l'œil qui s'était vissé derrière le guichet et recula d'un pas en regardant s'entrouvrir les vantaux sur le grand artilleur..qui prudemment...vérifiait qu'elle n'était pas accompagnée d'une bande de joyeux drilles, selon son habitude. Mais non, elle était bien seule..Oh que oui, elle aimerait enlever ses chausses...et même elle plongerait volontiers dans l'abreuvoir des chevaux ou dans n'importe quelle mare avec un plaisir non feint..La baronne va nu pied était en cet instant précis la parfaite réplique de ces épouvantails qui agitent leurs bras de bois pour éloigner les oiseaux des récoltes...Manquait plus que l'affreux chapeau et une carotte en guise de nez ! Elle émit un petit grognement à la remarque du lieutenant sans cesser de sourire et mit la main sur le bras qui venait de se poser à son épaule

Merci du compliment, lieutenant ! ça ne m'étonne pas de vous ! et..merci pour votre accueil...je suis contente de vous revoir...curieusement vous m'avez manqué...arf ! je crois bien que je vous dis ça toutes les fois que je vous retrouve...juste avant que vous me lâchiez vertement quelque vérité bien sentie ! Je vais essayer de me tenir du mieux possible, je vous le promets...faim, oui ! et soif..oui aussi ! Mais ça peut attendre...Arès est dans le même état de fraîcheur que moi, c'est pas peu dire...il a une sale gueule, lui aussi... gentil de vous charger de lui..Je vous précède, alors..

Les devançant, elle ralentit au passage du porche pour habituer ses yeux brulés par le soleil à la pénombre avant de déboucher sur la grande cour et regarda approcher la rousse flamboyante. Souriant à nouveau elle inclina rapidement la tête pour répondre à la maîtresse des lieux

Dame...merci de m'accueillir sans rancune. Contente aussi de vous voir..je pense que nous allons enfin pouvoir..parler librement et échanger d'égale à égale et pas...de gouverneur ou capitaine à ...subalterne. vous savez que je déteste ce mot là. Le registre ? ah ! oui...je vais de suite le signer...Vous avez vu, sa blessure est parfaitement guérie..à peine quelques poils blancs ! et il n'en ressent aucune gêne

Reposant la plume sur le parchemin après y avoir apposé sa signature, elle revint aux côtés de son hôtesse, et écartant un peu les bras en regardant ses vêtements, prenant un air aussi désespéré qu'elle pouvait

Voilà...pourrais-je vous demander un broc d'eau fraîche pour me débarbouiller ? Voyez à quoi je ressemble...

Aux souvenirs que le mot de rancune lui rappelèrent, la rousse préféra ne pas répondre, mais esquissa un nouveau sourire quand Lothilde lui confirma la bonne santé de son destrier.
Fixant toujours la femme, elle tendit son registre ouvert et la laissa y déposer son nom... et sourit vraiment en la voyant toute désespérée de l'état de sa tenue.

Hum... un broc, là je n'ai pas... mais si vous voulez bien venir jusqu'au puits, Dame Lothilde... je vais vous remonter ce qu'il vous faut... et vous serez tranquille pour vous rafraichir et vous dépoussiérer un peu...

Il suffit de passer à l'autre cour.... si vous voulez bien me suivre... c'est dans l'angle des bâtiments qui servent aux logis.

Tout en refermant le recueil de feuillets et jetant un regard à Zephirin qui pénétrait avec l'entier aux petites écuries Spike pivota sur elle-même et les laissant à sa gauche, traversa en biais la cour pour passer sous le grand porche qui séparait la basse de la haute. Contournant la viorbe, elle longea le bâtiment où était leur logis au premier et s'approcha de la margelle.